Bonjour à tous,
Voici ma tribune que Libération publie ce jour en réponse à celle de Bernard Henry-Lévy. Peut-on encore parler de morale à gauche ? N’hésitez pas à me faire pas de vos commentaires.
Bonne journée
Bernard-Henri Lévy, la morale et la gauche
La gauche doit-elle se soucier de la morale ? Au fond, voilà la question qui agite le débat public depuis plusieurs jours. Et les tempêtes médiatiques - si elles interdisent souvent de faire émerger une réalité toujours complexe - ont un mérite commun avec les disputes : leurs grands coups d’éclat font apparaître en plein jour les oppositions enfouies et les réflexes ataviques. A ce titre, l’affaire Polanski qui s’est aussitôt muée en affaire Mitterrand est très instructive des tabous de ma famille politique. Les explications nécessaires, les Français les ont obtenues et c’est bien là l’essentiel. Mais ceux qui, à gauche comme moi, les avaient réclamées ont très vite été la cible d’un flot ininterrompu de quolibets et d’excommunications.
Tour à tour les « procureurs du dimanche » ont été affublés des plus beaux sobriquets : homophobes révélés, populistes cyniques, moralistes ridicules, tenanciers de l’ordre moral brigadiers des mœurs zélés, espions charognards de l’intime…
Ces anathèmes pulsionnels sont les conséquences de blocages interdisant la gauche de penser la morale.
Le premier est structurel. Traditionnellement, il ne faut pas s’en occuper, car elle est l’antichambre de l’enfer conservateur et le refuge maléfique de l’autre camp : la droite sectaire et pudibonde.
Le second, conjoncturel, tient au fait que ces affaires se sont cristallisées sur deux figures « intellectuelles », Roman Polanski et Frédéric Mitterrand. Comment demander des comptes à ces figures de liberté et de génie ? La gauche peut, dès lors, se permettre d’utiliser aveuglément l’artillerie lourde des grands principes et lancer la cavalerie de l’angélisme. On ira même jusqu’à réclamer la délirante immunité artistique pour Polanski…
Le troisième, lui aussi conjoncturel, scelle ce triptyque des tabous : c’est l’interdiction de se retrouver dans le même wagon que les extrêmes. Entendons-nous bien. La question n’est pas de savoir si telle ou telle figure est coupable ou non. La question est de savoir s’il est possible d’interroger, sur la base de faits ou de déclarations portés à la connaissance du public, la responsabilité de ceux qui en seraient les auteurs, et si cette question peut, enfin, émaner d’un responsable de gauche ?
Or, même Bernard-Henri Lévy, immense intellectuel, qui dénonçait, il y a deux ans, lucide et courageux, les atavismes de sa famille politique dans Ce grand cadavre à la renverse, n’aura pas su résister longtemps aux sirènes de la facilité (lire «Affaire Mitterrand : et si on inculpait Léon Blum ?» en
Cette faiblesse argumentative renvoie donc à une profonde incompréhension (générationnelle ?).
Mais quelle mouche pique donc cette jeune génération de gauche pour qu’elle tienne tant à s’occuper de morale ? La réponse est limpide. A l’heure où le flottement sarkoziste sur les valeurs est à son comble – népotisme, avec la nomination surréaliste du « dauphin » à la tête d’un établissement public, autorité en faillite, quand on envisage de payer des enfants pour aller à l’école, rapport à l’argent incestueux avec les puissants, ingérence permanente du politique sur le terrain de la justice -, je n’envisage pas d’abandonner la morale politique aux griffes des extrêmes ou des souverainistes. Notre démocratie n’y survivrait pas. Dans ce combat, je sais que nous serons nombreux à défendre une éthique de la responsabilité et de la transparence.
Très bon texte, rien à redie.
Rédigé par : Martin Razy | mercredi 14 oct 2009 à 10h12
Très bonne tribune Manuel VALLS! Vous incarnez une ligne politique de gauche forte et linéaire qui se refuse à toute démagogie. Vous avez raison de vous soulever, voire de vous révolter contre certains comportements inadmissibles de l'exécutif actuel. Ce n'est pas une fin en soi mais cela est parfois nécessaire lorsque l'on transgresse certaines valeurs telles que le mérite, le travail ou la protection de l'enfance.
Rédigé par : Guillaume | mercredi 14 oct 2009 à 14h47
Bien sûr que la gauche doit se soucier de la morale, Ne pas laisser le FN seul le faire svp ....
Rédigé par : Françoise G. | mercredi 14 oct 2009 à 16h25
Ce texte est effectivement limpide et je le soutiens sans réserve.
Il est aujourd'hui insupportable de voir s'étendre ce débat ahurissant qui oublie finalement l'essentiel : la violence et les ravages que provoque le tourisme sexuel sur notre planète. Un oubli coupable, au secours de la solidarité entre les puissants. Simples citoyens, nous ne pouvons qu'être les spectateurs silencieux d'attaques contre ceux qui s'indignent et s'engagent contre ce fléau. Cela suffit.
Car il ne s'agit pas là de littérature, ni d'états d'âme de client écrivain repenti. La mauvaise vie n'est pas celle du passé, ou celle d'un chapitre de livre. La mauvaise vie est celle d'aujourd'hui, de centaines de milliers de touristes qui viennent en Asie, en Afrique, partout où le pouvoir d'achat leur est favorable, profiter et échanger leur relative richesse contre du sexe tarifé.
Là-bas, des hommes et des femmes, exposés nus, avec des chiffres collés sur le corps, venant de zones rurales, parfois malades, souvent mineurs, d'une incroyable pauvreté, à l'espérance de vie terriblement faible. Des hommes et des femmes comme des animaux, battus quand peu profitables, qui s'offrent au touriste rigolard et saoul.
Responsable de programme humanitaire, j'ai autrefois travaillé durant plusieurs années dans ces zones de mort et de désespoir. Il faut avoir vu la manière dont sont traités ces travailleurs du sexe pour ne pas pouvoir supporter la moindre tolérance.
Oui, c'est un sujet qui touche à notre morale et ce mot de doit pas faire peur aux intellectuels pourtant toujours prompts à s'enflammer contre toutes les injustices de ce monde. C'est un sujet qui doit bien sûr interpeller le politique, qui selon moi doit se positionner sur ce type de sujet, proposer, s'engager, faire. C'est bien là toute la noblesse de l'engagement politique.
Rédigé par : Jean-François Hassoun | mercredi 14 oct 2009 à 18h16
Bonjour Manuel,
Alors que le pouvoir UMP est en plein naufrage idéologique en plus d'un bilan catastrophique (que peuvent penser les electeurs de Sarkozy entre la campagne 2007, ses valeurs et la conduite actuelle du pouvoir ?), la gauche courageuse doit affirmer ses valeurs: morale publique,réduction des inégalités sociales, defense de l'ecole et des valeurs republicaines (laicité, mixité sociale, mérite), defense des classes moyennes et populaires, des droits des minorités , sécurité ... Ces valeurs ne sont pas de droite ni réactionnaires (ou pire), elles correspondent au "vivre ensemble" du plus grand nombre que la gauche doit retrouver pour gagner en 2012. Je suis sur que de plus en plus de personnes vont se rallier à vous (dont les quadras du PS) pour que le lien entre la population et la gauche se renoue lors des primaires. Tout mon soutien
Rédigé par : Christophe Puy de Dome | mercredi 14 oct 2009 à 22h58
les valeurs morales, les valeurs humanistes ce sont les valeurs qui ont fondé noter constitution, ce ne sont pas des valeurs idéologiques ce sont des valeurs de l'idéal de l'humain tout simplement et ce sont pour ces valeurs qui n'appartiennent ni à la droite ni à la gauche qu'un mouvement progressiste démocratique dit postmoderne doit se lever entre la gauche postmoderne (droite de la gauche non idéologique avec les verts, les démocrates dits centristes et la gauche de la droite d'un capitalisme créatif NON FINANCIER
RégisModem
http://www.mouvementdemocrate.fr/
Rédigé par : regis | jeudi 15 oct 2009 à 07h24
Arrêter de faire le jeu de la droite en réagissant systématiquement à toutes les affaires et scandales que l'on vous présente. Les français sont indifférents aux démêlés des Pieds Nickelés de Clearstream, aux voyages de Frédéricet, au piston du petit Jean, aujourd hui c est du plutonium : ce qui les intéresse c'est comment et quand une vrai politique de ré industrialisation de la France va être élaborée et va être mise en place. La Gauche a une carte majeure a jouer en terme de proposition face a une droite sans idée. C est avec des propositions pour la création d emploi que nous souhaiterions vous voir investir les media.
Sorter du microcosme parisien bien au chaud dans son job et penchez vous sérieusement et avec originalité sur nos problèmes, loin des litotes de l extrême gauche. C est le plus court chemin pour revenir aux affaires.
Rédigé par : Black Jack | jeudi 15 oct 2009 à 09h04
Je soutiens sans réserve moi aussi ces propos.
C'est incroyable que des personnes de gauche puissent, au motif qu'elles estiment que respecter des principes de respect, de vie, c'est faire la morale, et que faire la morale, c'est "d'extrême droite", cautionner, voire reconnaitre le droit à certains de contourner la loi, de consommer les autres pourassouvir leur propre plaisir...
Rédigé par : Sylvie | jeudi 15 oct 2009 à 11h01
Tout à fait d'accord avec les commentaires précédent.J'espère que les français vont réagir et ne plus accepter les frasques journalières de notre dirigeant N°1.Il ne suffit pas de porter la bonne parole et d'agir en sens inverse. La gauche doit nous éclairer et proposer une alternative pour 2012.
Arrêtons le grand guignol.
Rédigé par : Doume91 | jeudi 15 oct 2009 à 23h17
Bravo Monsieur VALLS pour vos "positions souvent iconoclastes" comme le considère le magazine LE POINT dans son dernier baromètre.
J'ai particulièrement apprécié votre note sur ou plutôt contre BHL, ce Monsieur "Je sais tout" dont la prétention et la morgue souvent
m'insupportent.
Attendons sa réponse, s'il y en a une.
Bravo également pour votre réaction contre la traditionnelle permissivité de la gauche.
Vous devez vous sentir bien seul dans ce combat envers les positions et pratiques déplorables de nos ''élites',mais votre démarche est courageuse: continuez à traçer la route, elle est encore longue...
Rédigé par : Jacques BLANC | vendredi 16 oct 2009 à 09h49
Je ne suis pas très originale et je veux dire aussi mon soutien aux propos lucides et courageux de Manuel Valls.
Je rejoins les différents commentaires de ce billet sur l'abjection de l'exploitation humaine malheureusement encore actuelle. Frédéric Mitterrand a pris la responsabilité d'écrire un livre et de le faire publier, ce n'est pas anodin. Et tous les auteurs n'ont pas la chance qu'un éditeur publie leur oeuvre.
Il lui aurait probablement été plus utile de recourir à une psychanalyse ou autre moyen psychologique pour gérer ses pulsions... Même ce déballage mériterait d'être analysé, tant il s'apparente à de l'exhibitionnisme (cf. les extraits de 3 pages sur le site du journal le Monde : immonde et révoltant...)
Je trouve vraiment minable de brandir la "beauté" de l'oeuvre littéraire pour atténuer la crudité des propos : certes, F. Mitterrand a un talent d'écriture mais pourquoi l'utiliser pour déverser tant d'horreurs ?
Quant à la morale, elle n'est pas de droite ni de gauche et encore moins des extrêmes, cela existe dans l'organisation des civilisations et des sociétés, de façon universelle, modulée selon les cultures et les époques.
Cela appartient à la société en général, donc à personne en particulier.
Là encore, Manuel Valls a raison : si l'affaire était arrivée à un ministre de gauche dans un gouvernement de gauche, qu'aurait été le comportement de ceux qui affirment haut et fort leur soutien ?
Je doute que les mêmes personnes auraient brandi les mêmes arguments dans ce scenario.
Dans cette conception de la morale, elle est bien élastique pour s'adapter selon le camp...
"Selon que vous serez puissant ou misérable,
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir."
Jean de la Fontaine, Les animaux malades de la peste
Dommage que rien n'ait vraiment changé dans ce domaine...
Pour Black Jack : Manuel Valls étant député de l'Essonne et maire d'Evry (où il réside), il n'évolue pas constamment dans un "microcosme parisien bien au chaud dans son job", vous pouvez venir à Evry pour le constater... Vous y trouverez les Champs-Elysées, mais sans bling-bling...
Rédigé par : Bénédicte (Essonne) | mardi 20 oct 2009 à 18h08
C'est bien, maintenant faut raisonner efficace, et pas a chaque fois suivre les vieilles chaussées administratives à segments désuets et l'organisation devrait être réactive vous êtes entrain de dormir à trop discutailler primaires.
Place aux initiatives courageuses individuelles de gens notoires ..
ou alors restons derrière un ordinateur
MoDem894
Rédigé par : am | dimanche 25 oct 2009 à 10h29
Bonjour,
quelle est la question ? la morale en politique ou la morale des hommes et femmes politiques?
Je suis pour que la politique se mêle de bien et de mal:Mr Badinter en portant l'abolition de la peine de mort nous parlait du bien et du mal dans notre société. Il a su faire se rencontrer la philosophie et l"action publique pour le Bien de tous. Grâce à ça nous ne sommes plus collectivement des assassins. Mr Badinter nous a fait progresser dans la morale humaine.
En revanche clouer au pilori le michton de l'elysees ne parle pas de morale.
Pour moi l'erreur du ministre de la culture a été de dire que la justice américaine était nulle et que Polanski ne devait pas être condamné. Il a profité de sa tribune de ministre pour exprimer son intime conviction. Il n'est pas question de morale, ici, mais de justice. En tant que ministre il doit se tenir au devoir de réserve.
En revanche juger ses expériences sexuelles, qu'il a partiellement analysées et dont il n"est vraiment pas fier, ne participe pas à la morale politique. C'est un lynchage médiatique des plus hypocrites.
Faites nous croire, Messieurs et Mesdames les politiques, que vous avez toujours au cours de votre vie observé la plus stricte moralité à titre individuel...Mitterrand a eu une certaine audace a mettre noir sur blanc son expérience sur un sujet dont on ne parle toujours pas. Le tourisme sexuel. Qui a pourtant pris ces 20 dernières années une ampleur hallucinante. Et ce parce que la demande, de nous pays riches, est toujours plus grande. Je ne vais pas développer ici mais il y a beaucoup a dire sur notre responsabilité dans cet état de fait. Là serait un vrai débat sur la morale politique. Un débat ou les valeurs de gauche pourraient être défendues avec brio. Une, par exemple, qui dit qu'on ne peut considérer un être humain comme une denrée consommable.
Mais vous avez préféré jouer le jeu de Sarko 1er en tapant sur le punching ball qu'il avait mis à votre disposition. Quel courage politique !
Si l'envie d'attaquer une personnalité sur sa vie privée pour déstabiliser le pouvoir vous parait sensée pourquoi vous attaquer a un Mitterand (comme Melenchon, je sursaute encore quand ce nom apparait dans l'actualité, inconsciemment il est lié au seul Président de gauche que j'ai connu)alors qu'un vrai allié politique de Sarko étouffe depuis des années un scandale de famille lié aux mœurs :le faux dévot Philippe de Villiers. Un de ses fils n'arrive pas a publier son livre. Posez la question au journaliste-éditeur Guy Birenbaum sur ce qui s'est passé en 2007 lors de son éviction de la maison d'édition ou il travaillait et comment le livre du rejeton vendéen a été trapé.Là il y a du scandale sexuel, et de la pire espèce puisque étouffé par le pouvoir.
A la veille des régionales ça peut faire quelques dégâts de bon aloi dans le camp d'en face...
Je ne saurais trop vous conseiller d'aller voir"le Ruban Blanc" magnifique Palme d"or 2009. Il y est aussi question de l'hypocrisie de la morale publique quand pourtant le mal a fait son nid dans la sphère privée, que les victimes sont ignorées à cause du maintien coute que coute des bonnes apparences des notables soi disant bien pensants.
Bon Dimanche.
Rédigé par : Sophie | dimanche 25 oct 2009 à 12h45