Retrouvez la tribune publiée ce matin dans Libération que je cosigne avec Gaëtan Gorce et Louis Gautier.
Où va le Parti Socialiste ? Les mois passent, et la confusion ne fait que s’accentuer. Le traitement des questions essentielles, telles que la redéfinition du credo des socialistes (la déclaration de principes) ou de leur constitution interne (la révision des statuts) est ainsi relégué, ce 14 juin, à une convention «périphérique», déconnectée de la grande explication de l’automne. Ce timing n’est pas sans signification. Il traduit un ordre de priorités : l’essentiel est traité en accessoire et le meilleur, à savoir le partage du pouvoir, est gardé pour la fin !
Là, pourtant, se résume le mal qui ronge le Parti socialiste. Hypnotisés par 2012, ses dirigeants ne prêtent plus attention aux idées, sauf pour en faire l’instrument de luttes d’appareils ou de querelles personnelles. Et ceux qui font mine de s’en inquiéter ne cherchent en réalité qu’à préserver leurs propres chances. Nous n’avons été que quelques-uns à dénoncer, à l’été 2007, la logique implacable qui se mettait en place : les mêmes méthodes, disions-nous alors, ne pourraient que produire le même résultat. Nous y sommes : Reims ressemblera soit à Rennes, soit au Mans, l’affrontement sans issue ou l’arrangement sans contenu.
Dans ces conditions, la convention du 14 juin ne pourra être qu’une occasion manquée de plus. Faute d’avoir ouvert le droit d’amender, l’exercice est cadré, vissé, contraint. Le texte, dit-on, a été adopté par un comité réunissant toutes les «sensibilités». Mais de quelles sensibilités s’agit-il ? Toutes ont plus ou moins explosé depuis le congrès du Mans où elles se sont constituées et mesurées. Elles ne représentent donc aujourd’hui que des rapports de force passés et dépassés.
Comment s’étonner alors que le projet de déclaration de principe ait été écrit l’œil fixé dans le rétroviseur. Il est l’aggiornamento que les socialistes auraient dû adopter voici vingt ans. Ce qu’ont fait alors toutes les gauches d’Europe… Un écrit de rattrapage en quelque sorte ! Alors qu’il aurait dû fixer la vision de la gauche pour les vingt ans qui viennent !
Les grandes crises qui s’annoncent, écologique, alimentaire, stratégique, y sont à peine mentionnées. La vision du monde qui s’y trouve respire l’air des années 80. La mondialisation, qui constitue une formidable redistribution de la richesse comme de la puissance à l’échelle de la planète tout entière, ne fait l’objet d’aucune analyse approfondie. On n’y trouve nulle définition de ce que doit être l’identité de la gauche aujourd’hui. Ne devrait ce pas être au contraire un appel d’air, une invitation à agir, l’expression dans tous les sens du terme d’une aspiration et si possible vers le haut ?
La grande bataille dans laquelle est engagée la gauche ne pourra être gagnée à coup de déclarations insipides : elle oppose les forces qui s’appuient sur la peur et les angoisses que suscitent les incertitudes du monde, la montée de la précarité et l’instabilité des destins, à celles qui veulent au contraire rendre aux sociétés et aux hommes la maîtrise d’une part de leur destin. La gagner supposerait de «requalifier» la belle notion de progrès, en y intégrant l’exigence écologique. Elle implique de redéfinir l’exigence d’égalité pour l’associer à celle de réussite et d’émancipation individuelle. Elle passe par la réaffirmation de la «raison» et de l’idéal d’une laïcité moderne, pour faire pièce à la montée des peurs et de l’irrationnel. Elle implique une nouvelle idée de la République, capable d’intégrer les différences et régénérée par sa lutte contre les discriminations.
Elle appelle une nouvelle appréciation des rapports de forces à l’échelle mondiale pour bâtir une stratégie européenne adaptée. Elle impose de substituer à une vision de la société, en termes de classe ou d’intérêts catégoriels, une référence constante : la recherche de l’intérêt général et une éthique de la responsabilité, pour les citoyens comme pour les responsables politiques, sans lesquels la démocratie sombrera face au marché et surtout au populisme et à la démagogie.
Un tel texte ne verra pas le jour : non parce qu’il serait trop ambitieux mais parce que jugé, par la direction du PS, hors de propos. Pourquoi s’engagerait-elle dans des débats difficiles alors qu’il est si simple de s’entendre sur un minimum ? Le «système» socialiste cadenassé par les luttes d’intérêts ne fait plus de place à la délibération collective.
Faut-il pourtant se résigner à une nouvelle victoire des conservatismes ? Plutôt que de s’en remettre à l’ersatz de révision des statuts mis en discussion, la solution pourrait venir d’une réforme simple, de bon sens. Pour déjouer les manœuvres de congrès, les arrangements d’appareil, sans sacrifier le débat d’idées, nous proposons de voter, le même jour et en même temps, pour les motions et pour notre premier secrétaire. Nous pourrions de la sorte entrer dans le congrès avec un vrai leader pour en sortir avec une vraie stratégie.
Ainsi, alors que chacun s’interroge aujourd’hui sur l’issue du congrès, nous pourrions nous donner les moyens de le réussir, avant même qu’il ait débuté. Utopie ? Sans doute pour ceux qui vivent en circuit fermé. Mais consultons les militants et nous verrons bien s’ils préfèrent l’atmosphère confinée des commissions des résolutions ou le grand vent du suffrage direct !
J'approuve vos idées et votre démarche.
Bon courage pour faire "bouger" les choses au PS. La gauche et la France en ont besoin.
Avec tout mon soutien.
Une sympathisante de gauche
Rédigé par : Marie | mardi 10 juin 2008 à 22h57
Je ne peux que saluer la continuité et la persévérance dans la démarche de Manuel Valls, qui, depuis ses débuts en politique, a toujours oeuvré pour le renouvellement des idées et des hommes (et des femmes, bien entendu), a toujours travaillé pour le collectif. Serons-nous assez nombreux pour appuyer sa démarche et éviter les chausse-trappe et pièges à c... qui nous sont tendus à coups de sondages et de communication pour le prochain congrés mais plus largement pour la rénovation du parti et de la gauche.
Il nous faut nous armer. D'idées, de volonté pour débattre, de courage pour faire progresser ces idées, voire pour se "battre". Intellectuellement, ça va de soi.
Rédigé par : Aymeric | mercredi 11 juin 2008 à 14h21
Contrairement à vous je ne m'etonne absolument pas pas de la façon de proceder actuelle au PS.
Je m'étonne même qu'elle n'est pas été mise en place plus tôt afin que soit désigné -notamment aux elections presidentielles- un candidat correspondant au "credo" socialiste car cela aurait permis deux choses !
1)De mesurer la force de conviction du(de la ) candidat(e) car un candidat aux presidentielles doit avant tout être force de persuation
2) De savoir si le "socialisme" pouvait encore convaincre
Je suis d'accord avec vous lorsque vous définissez les grandes batailles, je suis encore d'accord avec vous lorsque vous dites définissez la grande bataille dans laquelle est engagée la gauche
Il faut juste savoir de quelle gauche nous parlons.
Nous ne parlons plus depuis longtemps de gauche communiste (clin d'oeil j'ai entendu votre histoire sur public sénat) et le socialisme est mort .
Partant de là nous vivons dans une économie de marché, libérale faisons en sorte qu'elle soit démocratique et sociale !
Faisons en sorte de réguler le marché et de réguler le profit.
Re/decidons quels sont les marchés qui doivent/peuvent être laissés au privé et ceux qui ne le pourront jamais
ex pouvons nous accepter un jour une armée privée comme aux USA , la santé est elle un marché, l'éducation...?
Que voulons nous pour la France et ces citoyens et comment voulons nous repartir l'effort ?
Par l'impot sur le revenu , par la TVA ou par les Taxes sur les salaires ...???
C'est sur ces grands principes qu'il faut réflechir dors et déjà pour 2012 et après.
Ce n'est pas vous qui avez besoin du PS...le PS n'est qu'un outil pour financer une campagne électorale...
C'est le PS qui a besoins de vous et surtout de nous pour le financer
Rédigé par : florent | jeudi 12 juin 2008 à 14h06
Exposez-nous votre façon de voir les choses, contactez-nous si vous le souhaitez, participez à un congrès de façon pacifique et n'oubliez jamais que ce sont nous les militants qui déciderons et non les auditeurs du "fou du roi" ou les "sympatisants" qui regardent de loin et surtout pas de langue de bois. Partant de là bon vent !
Rédigé par : Legouy Pierre | jeudi 12 juin 2008 à 15h11
@ Legouy Pierre,
Quel mépris des électeurs! Au final ce sont les français qui décideront. On ne gagne pas une élection nationale uniquement avec un rassemblement de militants mais avec un projet plausible susceptible de convaincre une majorité de français.
Rédigé par : Marie | jeudi 12 juin 2008 à 18h46
Les patrons socialistes solidaires qui souhaitent embaucher ne peuvent le faire.
Depuis trente ans des lois fiscale obsolètes taxent le travail au lieu de taxer les bénéfices et le CA.
Le PS est tellement largué économiquement et encore au stade de la lutte des classe (Julien Dray) qu'il n'a pas compris ce B.A. BA !
Se contentant de chercher la vérité chez des "spécialistes" n'ayant jamais géré eux même, les socialistes s'éloignet chaque jour de la réalité du monde du travail.
Et vous Manuel, comprenez pourquoi quand on peut faire simple, le PS veut faire compliqué ?
Rédigé par : Ozenfant | dimanche 15 juin 2008 à 18h13
Manuel,
Ce ne serait pas une "idée qu'elle est bonne" de faire lire votre blog par quelqu'un ?
Vous savez, pour que votre indifférence pour les avis de vos admirateurs-électeurs-posteurs ne se voie pas trop ?
Rédigé par : Ozenfant | lundi 16 juin 2008 à 10h24
William Friedman est plus un analyste au sens anglo-saxon du terme, de tendance conservatrice et attentif aux facteurs d’armement et de force, dirigeant une société d’analyse (Stratfor) dont les proximités conservatrices, notamment du Pentagone, sont connues. George Pfaff vit hors des USA (à Paris) et il est, avec sa culture historique, l’un des commentateurs américains les plus aptes à comprendre les affaires européennes, et particulièrement les affaires françaises
Les idées de Pfaff et de Friedman sont totalement étrangère aujourd’hui aux élites européennes, surtout françaises, plus que jamais “européistes”, pro-anglo-saxonnes, pro-américanistes idéologiquement, adeptes de l’Europe à 27+ et ainsi de suite.
Mais que valent les conceptions de ces élites, hors de l’esprit de mode et d’un conformisme de fer absolument fermé?
Rien, sans nul doute, – avec la réserve que la médiocrité est aujourd’hui la vertu la plus aisément triomphante sans aucun doute si l’on s’en remet aux forces politiciennes, non-historiques en jeu. Donc, il ne faut pas trop compter sur les hommes, surtout en France. Mais il y a les événements, c’est-à-dire l’Histoire, qui fait très vite ces hommes petits, leur restituant leur réalité sans fard. Le fait est qu’après le “non” irlandais, la sauvegarde de la catastrophique orientation actuelle est de plus en plus malaisée, comme le note le Guardian aujourd’hui, avec la marque symbolique de cette orientation, déjà annoncée, que Barroso commence à être mis en cause.
http://www.dedefensa.org/article.php?art_id=5205
Rédigé par : Ozenfant | vendredi 20 juin 2008 à 18h01
cher mr valls
que pourriez nous dire sur la conférence "bilderberg" auquel vous avez participé récemment?? et pourquoi la presse n'a pas parlé de cette réunion de l'élite mondiale, qui s'est tenue à Chantilly,Va(USA)du 5 au 8 juin.
Et on s'étonne que les gens se désintéressent de la politique?
Rédigé par : Michel | samedi 21 juin 2008 à 17h12
Juste un commentaire d'encouragement. Heureusement qu'il y a des personnes comme vous, qui donnent un peu d'espoir à ceux qui en ont ras-le-bol des éléphants sclérosés.
Un peu plus de pragmatisme, c'est ce qu'on demande au PS, bon courage!
Rédigé par : Jori | mardi 24 juin 2008 à 11h21
Avancer
Les socialistes ont raconté des mensonges aux français par ignorance du monde qui nous entoure (frontières ouvertes), du monde dans lequel on vit (vieillissement de la population française), et pendant le même temps, ont alourdi l’Etat d’une quantité considérable de fonctionnaires territoriaux. Pas étonnant si l’économie ne peut plus avancer… Il faut réduire la taille de l’Etat, c’est la seule solution de long terme valable pour remettre l’économie sur les rails. L’Etat est trop gros, trop vieux il faut le dégraisser dans beaucoup de domaines. Moins de fonctionnaires produiront moins de textes inutiles. C’est le bon sens même. Aujourd’hui Sarkozy fait un travail salutaire de remise en question qui oblige la gauche a se remettre elle-même en question , à redéfinir ses valeurs dans un langage d’aujourd’hui, pour des problèmes d’aujourd’hui : c‘est à ce prix que l’opposition actuelle sortira de son rôle de sinistre guignol qui lui va si mal et qui ne lui permet pas d’accéder, aux yeux des français, à un minimum de crédibilité.
Rédigé par : optimist | mardi 24 juin 2008 à 17h36
sauvons le PS et je pense qu'il faut des personnes comme Manuel Valls qui vivent avec leur époque et non dans des idées passées . L 'avenir peut être et doit être dans l'amélioration de la qualité de vies des citoyens .Et non dans une jungle Sarkoziène ou les plus riches vivraient sur le dos des autres . Le monde doit être meilleurs à nous de montrer l exemple . Avancer ce n'est pas reprendre les idées du passées .Le monde avance ne revenons pas en arrière un Militant
Rédigé par : JEAN-REMY | mardi 24 juin 2008 à 22h24
En effet il faut que le PS évolu s'il veut regagner une présidentielle.
Personnellement, je ne voit aucun candidat sérieux et crédible qui pourrait gagner la présidentielle à part vous, si vous arrivez à changer le PS.
Bon courage.
Rédigé par : Aurélien | dimanche 28 sep 2008 à 22h41